1. Demande de contre-expertise soulignant les contradictions de l’expertise
I / Rappel des faits et de la procédure :
► D est mis en examen et placé en détention provisoire dans le cadre d’une instruction criminelle depuis le … du chef de : − Tentative d’assassinat
► Un rapport d’expertise psychiatrique a été rédigé par les Experts Y et Z le …, adressé à la défense le …. et reçu le ….
► le…, par déclaration au greffe, le Conseil sollicitait qu’il plaise au magistrat instructeur d’ordonner une contre-expertise. Par ordonnance en date du …., notifiée le même jour par télécopie, le magistrat instructeur devait rejeter cette demande. C’est cette ordonnance dont il est fait appel. Monsieur D, par l’intermédiaire de son Conseil, sollicite qu’il plaise à la Cour d’infirmer l’ordonnance dont il est fait appel et d’ordonner une contre-expertise psychiatrique, sous le bénéfice des explications de fait et de droit livrées ci-dessous. En effet, le rapport d’expertise dont discussion, contient plusieurs contradictions relatives à la discussion tirée de l’examen psychiatrique rapporté. En outre, l’existence ou non d’un risque de réitérations des faits n’est pas évoqué.
Discussion :
En droit :
►Aux termes de l’article 167 du Code de procédure pénale
En fait :
► Sur le premier paragraphe de la réponse à la question n°8
Les Experts confirment le diagnostic d’une pathologie mentale chronique du registre des troubles du spectre autistique. Ils relèvent « un sentiment diffus de d’hostilité du monde extérieur » notant toutefois que l’intéressé « garde un contact avec le réel ». Les Experts semblent étayer l’argument en faveur d’un contact avec le réel par le raisonnement suivant :
– a. « Il n’a pas développé de délire de persécution systématisé, qu’il soit en secteur ou plus diffus en réseau »,
– b. « Ce sentiment d’hostilité fait suite à des éléments de réalité, même s’il a pu exagérer certaines de ces craintes »,
– c. « Bien qu’il ressente depuis longtemps une certaine hostilité de la part d’autrui, il ne s’agit pas de persécuteurs désignés »,
– d. « Il a pu jusqu’alors garder la maitrise de ses comportements ».
La présente discussion porte sur les éléments de ce raisonnement :
1. En premier lieu (point « a »), le vécu de persécution de l’intéressé, voire une psychose paranoïde sont rapportés dans de multiples pièces médicales :
– Le …. : « Hospitalisation pour épisode de persécution ». « Celle-ci aurait décrit de l’angoisse, un vécu de persécution (…) »,
– (Rapports d’expertise du Pr Y) : « Les troubles à type de vécu de persécution se seraient aggravés ces dernières semaines ». « D peut (…) décrire un sentiment de persécution (…). Le port du couteau semble s’inscrire dans un contexte de persécution », «(…) en proie à des angoisses de persécution». « On perçoit alors l’aspect très paranoïde de s structure puisqu’il affirme qu’il ne voir pas les gens que comme mauvais, comme des ennemis », « Vision paranoïde du monde (…)», « Son examen révèle des anomalies mentales du domaine de la psychose paranoïde avec une vision persécutoire dangereux dont il faut se protéger».
– Rapport d’expertise querellé : « Etant donné le jeune âge du sujet, une évolution vers une schizophrénie reste possible si l’on prend en compte les modifications survenues au niveau du comportement depuis début 2014 avec agressivité et froideur affective ainsi que l’existence, alors qu’il n’était pas encore traité par Risperdal, d’un syndrome de persécution entrainant chez Monsieur une réelle peur du monde extérieur ». Il est à noter que tant dans les deux rapports d’expertises, de nombreuses pièces médicales rapportent que D était obsédé par l’idée de tuer notamment son ancien camarade du collège. […]
Il semblerait que dans le rapport querellé, les Experts « penchent » en faveur d’un vécu persécutoire sans lien avec une quelconque pathologie, en adoptant le raisonnement noté plus haut en « a, b,c ». D conteste ce raisonnement, les points a, et c sont des éléments factuels critiqués ci-dessous. En outre, les Experts, bien qu’ayant pris connaissance du rapport d’expertise du Pr Y, n’évoquent nullement (soit pour infirmer, soit pour confirmer), une des réponses des conclusions du rapport déposé par ces dernières : « Son examen révèle des anomalies mentales du domaine de la psychose paranoïde avec une vision persécutoire dangereux dont il faut se protéger ». (Rapport d’expertise du Pr Y p. ) Dès lors il convient qu’une contre-expertise psychiatrique soit organisée afin qu’il soit clairement statué sur les points suivants.
2. En deuxième lieu, Il est pour le moins curieux que les Experts relèvent que « Ce sentiment d’hostilité fait suite à des éléments de réalité, même s’il a pu exagérer certaines de ces craintes ». Les éléments délirants de type interprétatif, en lien avec une mauvaise compréhension des signaux émis par l’autre, sont d’ailleurs évoqués par les Experts.
3. En troisième lieu, contrairement à ce qui est relevé par les Experts, il existe bel et bien un persécuteur désigné, en parallèle de la vision paranoïde du monde.
Dès lors, les Experts ne peuvent – sans contradiction – relever à la fois la désignation réitérée et sans équivoque d’un persécuteur et tenir un raisonnement au terme duquel il n’existerait pas de délire de persécution systématisé au motif notamment qu’il n’y aurait pas de persécuteur désigné.
4. En quatrième lieu, les Experts ne peuvent raisonnablement tirer argument de ce que « Il a pu jusqu’alors garder la maitrise de ses comportements ». L’objectif d’une expertise psychiatrique, sur la question de l’abolition ou l’altération du discernement, consiste à jauger de la capacité de maitrise de l’intéressé au moment des faits. Dès lors, peu importe qu’avant ou après les faits, le discernement de l’intéressé soit aboli ou altéré. Par ailleurs, les Experts ne discutent nullement des déclarations de l’intéressé. Il convient que, lors d’une contre-expertise, les Experts présentent les arguments en faveur ou en défaveur de la perte de maitrise de D au moment des faits et indiquent leurs réflexions sur les déclarations de D reproduites ci-dessus.
Il est pour le moins surprenant que les Experts écartent, sans explication aucune, les raisons de passage à l’acte évoqué par D et confirmé dans la procédure, afin d’y substituer d’autres raisons de passage à l’acte.
► Sur l’absence de la précision du risque de réitération des faits Il n’est sérieusement pas envisageable de considérer le rapport d’expertise complet sans la réponse à cette question.
► Sur la motivation de l’ordonnance dont appel, c’est à tort que le magistrat instructeur a retenu les éléments suivants :
1. Dans l’ordonnance dont appel, la motivation souffre d’une confusion évidente entre différentes notions psychiatriques. Si ladite ordonnance reprend l’argumentation de la défense pour convenir de ce que « un vécu persécutoire » est une notion différente du « délire de persécution », elle ne répond nullement à la question soulevée relativement à la « psychose paranoïde ». En effet, le Pr Y relève chez D une psychose paranoïde. Le second rapport d’expertise ne mentionne en aucun cas de psychose paranoïde. La difficulté vient de ce que les seconds Experts, qui ont pris connaissance du rapport d’expertise du Pr Y, ne présentent aucun argument pour confirmer ou infirmer la pathologie diagnostiquée par le professeur. Ils ont tout simplement fait fi de cette pathologie.
2. La motivation de l’ordonnance dont appel souffre de contradictions
Il y est à la fois relevé l’existence de plusieurs persécuteurs désignés et à la fois tiré argument de ce que « c’est à raison que les seconds experts ont retenu l’absence de persécuteurs désignés ».
3. Il n’appartient pas au magistrat instructeur de se substituer aux Experts en indiquant que « les moments féconds sont sans lien direct avec cette notion de psychiatrie renvoyant à un moment d’exacerbation des délires chroniques ».
En effet, la demande de contre-expertise rejetée, visait notamment à interroger les experts sur cette question, la réponse devant être donnée par des professionnels de la psychiatrie.
4. Sur l’absence de question relative à la réitération des faits
Il est exact que l’ordonnance de commission d’expert a été communiquée à l’ancien Conseil de . Il est constant que ni l’ancien Conseil de D, ni le Ministère Public, ni le magistrat instructeur n’ont jugé utile que cette question soit posée. Pour autant, il est tout aussi constant, que lorsque l’affaire sera examinée par une formation de jugement, cette question sera au cœur des débats. Il serait pour le moins délicat de laisser la formation de jugement examiner l’affaire sans les précisions essentielles à ce type de dossier.
Par ces motifs
Vu les articles 81, 108 et suivants du Code de procédure pénale, D, par l’intermédiaire de son Conseil, sollicite qu’il plaise à la Cour de :
– Infirmer l’ordonnance dont appel,
– Ordonner une contre-expertise psychiatrique à tel collège d’expert qu’il plaira à la Cour de désigner, – Lui confier la mission habituelle.
2. Demande de contre-expertise sur la base d’une contestation des bases techniques de l’expertise
Sur le droit applicable
• En vertu des alinéas 3 et 4 de l’article 706-47-1 du code de procédure pénale : « Les personnes poursuivies pour l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 du présent code doivent être soumises, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. L’expert est interrogé sur l’opportunité d’une injonction de soins. Cette expertise peut être ordonnée dès le stade de l’enquête par le procureur de la République.»
• En vertu de l’article 706-47 13° du code de procédure pénale : « Le présent titre est applicable aux procédures concernant les infractions suivantes : (…) 13° Délits d’atteintes sexuelles prévus aux articles 227-25 à 227-27 du même code.»
Sur l’application de la Loi
Sur le fond
À l’évidence en rendant obligatoire la mesure d’une expertise psychiatrique dans le cadre de la procédure applicable aux infractions de nature sexuelle et de la protection des mineurs victimes, le législateur a souhaité mettre la Juridiction de jugement en mesure d’apprécier de manière éclairée la personnalité de l’intéressé et en conséquence – en cas de condamnation – prononcer une peine qui – notamment – assure la protection de la société et prévient la commission de nouvelles infractions. Si la déclaration de la culpabilité ne résulte assurément pas de cet élément de la procédure, en revanche il est patent que l’expertise psychiatrique commande directement la peine infligée (en cas de culpabilité avérée) tant dans son quantum et que dans sa nature et ceci conformément aux buts et fonctions de la peine édictés par l’article 130-1 du Code pénal
En l’espèce, le rapport de l’expertise psychiatrique ne saurait utilement éclairer le Tribunal. En effet, d’une part la méthode d’examen souffre incontestablement de fiabilité en ce qu’elle ne répond pas à des critères scientifiques. D’autre part, la « discussion » expertale est entachée de contradiction.
⇒ Sur la critique de la méthode d’expertise
L’Expert a procédé à 5 séries de questionnaires afin de répondre aux questions qui lui étaient posées par voie de réquisitions. Il s’agit de la méthode dite « actuarielle » ou à tout le moins « semi-structurée ».
- En premier lieu, bien qu’en matière pénale la méthode utilisée par l’Expert ne soit pas encadrée par la Loi, la méthode « clinique » est celle qui est pratiquée dans l’écrasante majorité des cas en France.
- En second lieu, à supposer que la méthode « actuarielle » ou « semi-structurée » puisse être intrinsèquement fiable, encore faudrait-il que les questionnaires qui la composent puissent être de qualité ou à tout le moins un minimum reconnus par la littérature scientifique. En l’espèce, les questionnaires sont les suivants :
– Test de personnalité d‘Eysenck,
– Questionnaire d’impulsivité,
– Questionnaire de personnalité PDQ4,
– Echelle HAD d’anxiété dépression de Sigmond et Snaith,
– Inventaire de symptomatologie dépressive IDS-SR.
L’ensemble de ces questionnaires s’appuie sur une analyse factorielle des réponses, analyse qui découle d’algorithmes dont les formules mathématiques – faute d’être explicitées dans le rapport – échappent au contrôle du Tribunal, du Ministère Public et des Conseils de parties. Enfin et surtout, sans analyse autre, la méthode est prédictive.
Le test de personnalité d’Eysenck :
– Relève du domaine psychologique et non de la psychiatrie.
– Il a pour prétention de mesurer deux facteurs : l’extraversion et le névrosisme. Ce test a vocation à suggérer une certaine prédictibilité des conduites à risque par l’intermédiaire de ces deux facteurs.
– Les hypothèses de construction de la personnalité de ce test reposent sur l’analyse factorielle.
Le Questionnaire d’impulsivité :
Il existe une multitude de tests afin de « mesurer » l’impulsivité. Faute pour l’Expert de préciser le questionnaire utilisé (UPPS, BIS-10dit test de Barrat, etc..), ni le Tribunal, pas davantage que le ministère public ou les avocats des parties ne sont en mesure de discuter de la fiabilité des scores relevés à l’aide de ce test.
⇒ Sur la critique de la « discussion » expertale
Faute de porter à la connaissance du Tribunal, du Ministère public et des Conseils des parties le contenu de l’examen clinique et de la discussion, le rapport d’expertise souffre de la possibilité d’une discussion contradictoire sur le fond.
1. En premier lieu, l’Expert relève (p.).
2. En second lieu, l’Expert soutient que B …
L’expert n’a entrepris aucune discussion relative au fait que le casier judiciaire de B ne porte trace d’aucune mention. Il aurait été utile de se pencher sur le point de savoir si cette circonstance ne discrimine pas de facto une perversion structurelle,
L’expert n’a pas pris en compte la dimension contextuelle. À l’évidence si déviance il y a, elle n’est pas chronique. Afin de mesurer la dangerosité de l’intéressé et les risques de renouvellement de l’infraction, il aurait été efficient que l’Expert se penche sur la dimension contextuelle du passage à l’acte.
PAR CES MOTIFS Vu les articles 156, 388-5, 463, 706-47 et 706-47-1 du code de procédure pénal ; Vu l’article 229-22-1 du Code pénal ; B sollicite qu’il plaise au Tribunal de :
DECLARER recevable et bien fondée sa demande ;
En conséquence, AVANT DIRE DROIT, ordonner une mesure de contre-expertise psychiatrique confiée à tel Expert près la Cour d’appel, ayant pour mission :
1° – Procéder à l’examen psychiatrique de B et dire s’il est en mesure de comprendre les propos et de répondre aux questions ;
2° – Dire si l’examen de l’intéressé révèle chez lui des anomalies mentales ou psychiques, le cas échéant les décrire et préciser à quelles affections elles se rattachent;
3° – Dire si l’infraction reprochée au sujet est en relation avec des éléments factuels ou biographiques de l’intéressé;
4° – Dire si l’intéressé était atteint au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ou ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes, au sens de l’article 122-1 du code pénal et définir si ce trouble peut être en relation déterminante ou partielle avec les faits reprochés à l’intéressé ;
5° – Dire si l’intéressé a agi sous l’emprise d’une force ou d’une contrainte à laquelle il n’a pu résister au sens de l’article 122-1 du code pénal ;
6° – Dire si l’état mental de l’intéressé risque de compromettre l’ordre public ou la sûreté des personnes et nécessiterait, dès lors, une hospitalisation en milieu spécialisé en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale ;
7° – Dire si l’intéressé présente un état dangereux au sens psychiatrique ou criminologique en énumérant les éléments de pronostic défavorables ou favorables ;
8° – Dire quelles sont les propositions thérapeutiques possibles et se prononcer sur l’opportunité, sur un plan psychiatrique, en cas de condamnation ultérieure, d’une injonction de soin dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire ;
De façon générale, faire toutes observations utiles à la manifestation de la vérité et consigner vos observations dans un rapport.
3. Demande de contre-expertise après une expertise réfutant l’abolition du discernement
En droit :
►Aux termes de l’article 167 du Code de procédure pénale…
En fait :
1. Sur « l’état des lieux » posé par l’Expert
À la lecture des deux rapports d’expertises, il apparaît que l’Expert relève :
– Un premier antécédent psychiatrique : hospitalisation du … au … Pôle santé publique CH… Ce dossier mettrait en évidence un épisode psychotique aigu par suite d’une consommation aigue de produits toxiques (avec bouffée délirante aigue).
– Un second antécédent psychiatrique : hospitalisation du …. au …. Hôpital de …
Ce dossier mettrait en évidence un diagnostic de trouble psychotique aigu d’allure psychotique., sans consommation de produits toxiques.
2. Sur les motifs ayant conduit l’Expert à écarter une abolition du discernement
L’Expert relève deux motifs :
D’une part, A n’a pas agi sous du fait d’un commandement lié à une hallucination,
D’autre part, le conflit domestique qui existait entre A et B était un élément de la réalité.
3. Le premier motif de la Discussion expertale est entaché de contradiction
En premier lieu et à l’évidence, il y a une contradiction entre le fait de relever que A présentait des hallucinations auditives au moment des faits et le fait qu’il n’ait pas agi sous l’injonction d’un commandement.
En effet, comment A qui, selon le même Expert, présentait « au moment des faits une pathologie psychotique décompensée, non soignée »peut-il faire la différence entre ce qui résulte d’une hallucination auditive et d’un commandement ou de la réalité ?
On peut même s’interroger sur le point de savoir en quoi l’hallucination auditive en elle-même ne serait pas un commandement ?
Enfin, le propre d’une hallucination est de paraître être la réalité pour la personne qui la subit et dès lors il est impossible pour A de faire la différence entre une hallucination, un commandement et la réalité, étant admis par l’Expert que sa pathologie était décompensée et qu’il était en proie à des hallucinations auditives au moment des faits.
En tout état de cause, dès lors que l’Expert admet d’une part que A était en proie à des hallucinations auditives au moment des faits et en état de décompensation, et par ailleurs dans un mode de vécu de persécution, il est indéniable qu’il se trouvait d’un état de fausseté absolue de jugement.
4. Le second motif de la discussion est entaché d’erreur
À supposer que A n’était pas en proie à une hallucination auditive au moment des faits ou que cette hallucination n’équivaille pas à un commandement, il est particulièrement nécessaire de voire trancher les points suivant :
L’ensemble de ces éléments amène à s’interroger sur le point de savoir dans quelle mesure sa pathologie a infiltré son quotidien au point de se promener en permanence avec un couteau sur lui pour se protéger d’une personne qui pour autant n’avait jamais exercé de violences sur lui. Dès lors, on peut affirmer qu’il présentait un vécu global d’insécurité et persécutoire qui polluait son quotidien en permanence.
En conséquence, sa perception de la réalité était emprise à la distorsion. En effet, son environnement pathologique ne pouvait que le faire accéder à une réalité faussée.
5. Sur « l’altération absolument majeure » retenue par L’Expert
La notion d’altération ou d’abolition du discernement est une notion binaire qui ne souffre pas de graduation.
Il est essentiel à la manifestation de la vérité qu’un collège d’Experts puisse procéder à une contre-expertise afin de trancher l’ensemble des points susvisés.
Pour toutes ces raisons et en application des articles 81 et 167 du Code de procédure pénale, A, par mon intermédiaire, sollicite qu’il vous plaise d’ordonner une contre-expertise psychiatrique en désignant un collège d’Experts avec les questions habituelles en sus des points soulevés dans la présente demande.
4. Demande de la nullité d’une expertise pour cause de conflit d’intérêt chez l’expert
À titre préliminaire, sur la recevabilité de nouveaux moyens de nullité. :
En droit :
►Aux termes de l’article 173-1 du Code de procédure pénale …
► Aux termes de l’article 174 du Code de procédure pénale…
En fait :
Le …, E déposait par l’intermédiaire de son Conseil le présent mémoire complémentaire en sus de la requête déposée le …. Les nouveaux moyens de nullité soulevés sont recevables.
Sur violation des dispositions relatives au caractère équitable, impartial et contradictoire de la procédure pénale, sur la violation des dispositions relatives au secret médical et sur la violation du principe de la loyauté de l’administration de la preuve :
En droit : sur violation des dispositions relatives au caractère équitable, impartial et contradictoire de la procédure pénale :
► Aux termes de son article 6.1, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dispose que : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (…) ».
► La Chambre criminelle rappelle que le défaut d’impartialité d’un expert peut constituer une nullité (Crim. 8 juin 2006, pourvoi n°06-81359).
► La Cour européenne des droits de l’homme a eu l’occasion d’énoncer que l’exigence du respect du principe de la contradiction, posée par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales s’étend aux expertises accompagnant la procédure juridictionnelle :(CEDH, 18 mars 1997, X… c/ France. Requête n° 21497/93).
En droit : sur la violation des dispositions relatives au secret médical
► Les articles L.1110-4 et suivants du Code de la santé publique consacrent le secret médical. Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant.
► Les articles 56, 60, 60-1 et suivants du Code de procédure pénale régissent la désignation d’un Expert, la collecte de toute donnée ou document utile à la manifestation de la vérité et les modalités selon lesquelles l’Expert peur prendre connaissance des pièces mises sous scellé.
En droit : sur la violation des dispositions relatives au principe de la loyauté dans l’administration de la preuve :
► Aux termes de l’article préliminaire du Code de procédure pénale : « I -La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties (…). En matière criminelle et correctionnelle, aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de déclarations qu’elle a faites sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et être assistée par lui ».
► Aux termes de l’article 6 de la Convention de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (…). 3. Tout accusé a droit notamment à : . a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; . b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; (…) ».
► Selon la jurisprudence de la chambre criminelle de la cour de cassation : le fait de susciter des échanges verbaux qui seraient versés au dossier pour être utilisés comme preuve, constitue un procédé déloyal d’enquête mettant en échec le droit de se taire et celui de ne pas s’incriminer soi-même et porte atteinte au droit à un procès équitable. Crim. 6 mars 2015 (Pourvoi n°14-84339).
En fait : sur la nullité du rapport d’expertise qui figure à la côte tirée de la méconnaissance du principe du secret médical et de communication de pièces placées sous scellés :
En fait : sur la nullité du rapport d’expertise qui figure à la côte …, tirée de la méconnaissance du principe de la loyauté dans l’administration de la preuve :
PAR CES MOTIFS
Vu l’article 6 de la CEDH, Vu les articles Préliminaire, 56 et suivants, 802 du Code de procédure pénale, Vu L.1110-4 du Code de la santé publique L.1110-4 du Code de la santé publique, Vu la jurisprudence, Vu les pièces versées aux débats, E, sollicite qu’il plaise à la Chambre de l’Instruction de :
– Le déclarer recevable en ses requête et mémoire complémentaire,
– Prononcer la nullité des cotes sollicitées par mémoire déposé le … : – « la réquisition de l’Officier de police judicaire ayant désigné le Dr Y comme expert, – le rapport du Dr Y, – le procès verbal de réception de ce rapport du …,
– Prononcer la nullité des cotes suivantes et tous les actes subséquents…
5. Demande de complément d’expertise pour cause d’insuffisance de l’expertise
À l’évidence et à juste titre, la vision d’un Expert diffère de celle d’un soignant. En soins, V est amenée à se rencontrer « elle-même », à décrypter et à comprendre son fonctionnement. Il serait illusoire et erroné de considérer que ce travail est terminé. Une personne détenue et qui fait face à une procédure criminelle pour la première fois, n’est pas forcement en mesure de comprendre que l’axe d’« exposé des faits », les raisons de passage à l’acte, ne sont pas abordés de la même manière par un psychiatre-expert que par un psychiatre-soignant : V a livré sa vision des choses, telle qu’elle la travaille avec le personnel soignant, ce qui a peut-être pu produire un discours auto-centré.
Mais surtout, il est posé à l’expert, la question de l’existence d’un clivage face à la gravité des faits, aux conséquences dramatiques, ce d’autant que V soutient que si elle avait prodigué les soins à son enfant, elle aurait peut-être survécu.
Au regard des éléments exposés ci-dessus et sous le visa des articles 156 à 169-1 du Code de procédure pénale, V vous demande qu’il vous plaise d’ordonner un complément d’expertise confié au Dr W aux fins d’audition de V et de Z et dépôt d’un complément de rapport au regard des observations ci-dessus.
Lorsqu’on obtient un accord sur une contre-expertise, il est recommandé de bien choisir l’expert, veiller au contenu de la mission qui lui est donnée, qui doit prévoir la demande de transmission des dossiers médicaux, la consultation des proches et des témoins des faits, du tuteur ou curateur, d’amis etc…
Parmi les témoignages méritant d’être recueillis : famille, amis, témoins des faits tuteur, curateur, assistante sociale, voisins…
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