Les éléments essentiels et incontournables de cette vérification judiciaire sont les certificats médicaux. A cette fin, l’article R. 3211-12 du Code de la santé publique précise :
« Sont communiqués au juge de la liberté et de la détention afin qu’il statue :
… 4° Une copie des certificats médicaux … au vu desquels la mesure de soins a été décidée … et de tout autre certificat ou avis médical utile, dont ceux sur lesquels se fonde la plus récente décision de maintien en soins ».
La 1e chambre civile de la Cour de cassation a précisé, le 30 janvier 2019 (n°17-26131, https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_2986/premiere_chambre_civile_3169/2019_9122/janvier_9123/85_30_41253.html), les pièces devant être communiquées au JLD. Pour vérifier que la mesure d’hospitalisation sans consentement est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état mental du patient et à la mise en œuvre du traitement requis (CSP, art. L. 3211-3), le JLD examine des pièces médicales et des pièces administratives. La production de l’ensemble des certificats médicaux est indispensable pour la régularité d’une procédure d’admission, faute de quoi la décision est irrégulière.
Concernant la méthodologie du contrôle du bienfondé de la mesure de soins, il existe deux points de contrôle : « 1. respect des conditions légales du cas d’hospitalisation visé (les certificats médicaux permettent-ils de conclure à la nécessité ?). 2. caractère adapté, nécessaire et proportionné de la mesure (une mesure moins attentatoire aux libertés serait-elle possible ?) » (Ecole Nationale de la Magistrature, document « Soins psychiatriques sans consentement 2013 » (à jour de la loi n°2013-869 du 27 septembre 2013), p.22).
Isabelle ROME explique « que le juge, dans sa décision, ne doit pas employer de termes médicaux, il n’a pas à motiver sa décision en disant par exemple : « parce que le patient est schizophrène ». Il statue au vu des éléments que lui donne le psychiatre. S’il veut s’appuyer sur le certificat médical, il doit mettre des guillemets quand il le cite. On ne doit pas a priori employer de termes médicaux dans une décision de justice » (Pluriel, mars 2013, p.3).
La Cour de cassation (Cass, Civ 1, 27 septembre 2017, n°16-22544, https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000035681676&fastReqId=974530575&fastPos=1) confirme cette méthodologie. Jean-Marc PANFILI explique ainsi : « La Cour de cassation a précisé qu’il résulte des articles L. 3211-12-2, L. 3216-1, L. 3212-3, L. et R. 3211-12 que le juge, s’il se prononce sur le maintien de l’hospitalisation, doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués. En statuant par des motifs relevant de la seule appréciation médicale, le président qui a substitué son avis à l’évaluation, par les médecins, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, a violé les textes susvisés. En conséquence, il revient au juge d’apprécier le bien-fondé d’une mesure d’hospitalisation, en se fondant uniquement sur les certificats médicaux dont il dispose, et non de substituer sa propre évaluation sur l’état de santé et la capacité à consentir du patient » [1]
Le juge ne peut à aucun moment intervenir dans les domaines qui sont de la compétence des médecins. Il ne peut donc lever la mesure sur le motif que les soins ont été consentis devant lui, et qu’en conséquence la contrainte ne se justifie plus.
Certains juges s’autorisent néanmoins, après audition du patient, à prononcer la mainlevée de la mesure d’hospitalisation alors que les certificats produits avaient, suite à l’évaluation médicale, conclu au maintien de la mesure. Delphine LEGOHEREL cite une ordonnance de la CA de Poitiers du 17 août 2015 (n°15/00033, https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000031116914&fastReqId=1176335312&fastPos=1), qui illustre la liberté d’appréciation dont dispose le juge. Dans le cas d’espèce, le magistrat considère que : « Les premiers certificats mentionnaient des troubles du comportement, un discours incohérent ponctué d’idées délirantes de persécution centrées sur son voisinage. A l’audience de ce jour M. X… tient cependant un discours relativement cohérent ; son comportement apparait calme et adapté. Il exprime le souhait de rentrer à son domicile et d’y poursuivre son traitement. Son conseil sollicite l’infirmation de l’ordonnance entreprise. Au vu du comportement maîtrisé de M. X…, l’hospitalisation complète n’apparait plus nécessaire. Une prise en charge ambulatoire du patient apparait suffisante » (Etude sur les soins psychiatriques sans consentement, décembre 2014, Service de documentation, des études et du rapport de la Cour de cassation, p.121).
Cour de cassation, 24 janvier 2023, n°22-18.429 : 8. S’il n’appartient pas au juge de porter une appréciation médicale en substituant son avis à l’évaluation, par les médecins, des troubles psychiques du patient et de la nécessité des soins, il lui incombe de contrôler la régularité de la décision administrative d’admission ou de maintien en soins psychiatriques contraints et le bien-fondé de la mesure. 9. Lorsque le certificat médical prescrit le maintien de l’hospitalisation complète, le juge peut, s’il l’estime utile, en considération d’autres éléments du dossier ou de ses propres constatations, demander une expertise médicale et ordonner ensuite, s’il y a lieu, la mainlevée de la mesure.
Cour de cassation – première chambre civile – 24 avril 2024 – n°23-18.590 : Le moyen faisant valoir qu’une ordonnance du premier président de Cour d’appel, en matière de soins sans consentement, doit être cassée lorsque celle-ci ne précise pas qu’il a été donné connaissance aux parties de l’avis du ministère public lors de l’audience (le ministère public n’étant pas à l’audience), ne peut pas être accueilli étant donné qu’il n’est pas argué que cet avis n’a pas été mis à disposition des parties, cette mise à disposition pouvant résultant de la décision mais également des pièces et de la procédure. Ainsi, la transmission, par le directeur de l’établissement, de la décision d’admission d’une personne à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent peut être prouvée par la mention portée sur la décision d’admission, conformément à l’article 3212-5, I, du Code de la santé publique.
[1] Jean-Marc PANFILI – Le juge, l’avocat, les soins, document mis à jour le 23/12/2018, p. 9
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