Accueil  »  Le statut du majeur protégé, du tuteur et du curateur dans la procédure pénale  »  Difficultés de mise en œuvre de l’obligation d’information du tuteur/curateur

Difficultés de mise en œuvre de l’obligation d’information du tuteur/curateur

Les autorités policières et judiciaires sont souvent confrontées à des difficultés pratiques dans l’application de ces textes. En effet, la plupart du temps, le mis en cause ne fera pas état de l’existence d’une mesure de protection à son égard. De même, les médecins requis n’ont pas toujours connaissance d’une telle mesure.

L’article D 47-14-1 alinéa 2 du CPP précise que « si les éléments de la procédure font apparaître un doute sur l’existence d’une mesure de protection juridique, le procureur de la république, le juge d’instruction ou la juridiction de jugement procède ou fait procéder aux vérifications nécessaires. »

En l’absence de l’existence d’un fichier national de la protection juridique consultable (à l’instar du casier judiciaire de l’intéressé) les policiers ou les magistrats en charge du dossier ne peuvent savoir si la personne poursuivie fait l’objet d’une mesure de protection.

Ils peuvent consulter le répertoire civil, ou l’extrait d’acte de naissance de l’intéressé, lequel malheureusement ne mentionne que l’existence d’une mesure de protection, sans la désignation du nom de l’organe tutélaire.

Un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation en date du 11/12/2018 a ainsi confirmé un arrêt de chambre de l’instruction concernant une garde à vue non notifiée au tuteur au nom de l’impossibilité de vérifier l’existence d’une mesure de protection :« L’arrêt relève notamment que si des éléments faisant apparaître un doute sur l’existence d’une mesure de protection devaient conduire le procureur de la République, malgré les dénégations de l’intéressé, à effectuer les vérifications nécessaires afin d’établir l’existence actuelle d’une telle mesure, des circonstances insurmontables ont fait obstacle à la vérification qui s’imposait, dès lors que, d’une part, informé de la dangerosité pour autrui de M. X…, résultant de la multiplication par l’intéressé d’actes de délinquance d’une gravité croissante commis au cours de la première quinzaine d’août 2016, ainsi que de la carence de l’autorité administrative, faute d’exécution d’un l’arrêté préfectoral de réadmission de M. X… en hospitalisation complète du 9 août 2016, le procureur de la République ne pouvait différer sa décision sur les poursuites, d’autre part, à l’heure de cette décision, prise suite aux informations qui lui ont été transmises par le service enquêteur, le vendredi à 18 heures 50, le procureur de la République, non plus que le juge d’instruction, faute de fichier national des mesures de protection juridique consultable par l’autorité judiciaire dans les mêmes conditions que le fichier central du casier judiciaire, ne pouvaient ni vérifier l’existence d’une mesure de protection ni prendre connaissance de l’identité du curateur, le juge des tutelles détenant seul cette information. » 

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_8743/2018_8744/decembre_9074/3062_11_40951.html

Les magistrats peuvent en pratique toutefois se rapprocher des magistrats du service civil du Parquet, lesquels ont connaissance des décisions des juges des tutelles de leur ressort, puisqu’ ils font des réquisitions écrites aux audiences.

Enfin, l’obligation d’aviser le curateur ou le tuteur ne pèse pas sur le Juge des libertés et de la détention (JLD) lorsqu’il ordonne la mise en détention du mis en examen ou son placement sous contrôle judiciaire. De même cette obligation ne s’applique pas au juge de l’application des peines (JAP), qui est chargé d’aménager les sanctions prononcées par les juridictions.

Pour résumer, l’organe tutélaire :

  • doit être avisé des poursuites dont le majeur protégé fait l’objet
  • peut désigner ou faire désigner un avocat
  • peut solliciter une expertise médicale
  • peut prendre connaissance du dossier
  • peut s’entretenir avec le majeur protégé.
  • doit être avisé des dates d’audiences (devant le juge d’instruction et les juridictions de jugement).
  • peut être entendu en qualité de témoin (voir observations ultérieures).
  • doit être avisé des décisions rendues (y compris les décisions de relaxe, d’acquittement ou d’irresponsabilité pénale).
  • peut disposer d’un permis de visite si le majeur protégé est incarcéré (y compris en détention provisoire).
Chapitres connexes :
  • L’information obligatoire du tuteur/curateur tout au long de la procédure
  • Le tuteur et le curateur peuvent être appelés comme témoins à l’audience
  • La garde à vue : dérogation à l’obligation d’aviser le curateur et le tuteur ?
  • Le juge des tutelles averti en cas de sauvegarde de justice ou de mandat de protection future
  • L’exercice des voies de recours
  • L’expertise médicale
  • L’assistance obligatoire par l’avocat
  • Le majeur protégé, victime d’une infraction pénale 
  • Accueil  »  Le statut du majeur protégé, du tuteur et du curateur dans la procédure pénale  »  Difficultés de mise en œuvre de l’obligation d’information du tuteur/curateur